❝ Dans la nuit où sont nées les étoiles, j’ai commencé à me consteller d’être. Il n’y a pas un seul atome de la plus lointaine étoile qui ne participe à mon être. ❞ - Fernando Pessoa
la nuit de Montréal a le silence lourd et ingrat de l’exil.
je tente en vain de travailler pour ne pas l’entendre, de penser rapidement pour le masquer. de m’inventer une distraction, pont fragile qui me relie à l’improbable lendemain.
c’est un silence qui ne dort pas,
immobile,
sans fantômes,
sans nos chères âmes en cavale.
inutile de vouloir le peupler avec une porte qui grince, un rideau qui s’ouvre et dise bonsoir. il est vide et sans promesse. si au moins, il y avait du vent car qui dit vent dit colère, qui dit colère dit vie. ou de la neige. neige muette mais qui laisse des traces, des pas qui crissent, qui glissent et dessinent leur empreinte.
as-tu senti le silence de cette nuit? si oui , alors n’ en dis rien !
la nuit descend d’abord avec ses petites joies qui allument les lampes, la fatigue qui justifie la journée, les rues qui brillent, les enfants qui dorment. on peut penser au jour écoulé, aux amis passés puis perdus à jamais et nous brûlons d’être appelés et surtout de répondre.
peut-être attendra-t-on un bruit de pas attardés dans l’escalier. puis les heures se perdent dans le noir à s’imaginer jugés par le silence, tout comme nous attendons en vain d’être jugés par Dieu. surgissent alors les justifications tragiques, les excuses méprisables jusqu’à l’indignité. c’est si doux se sentir enfin pardonnés, nous, les humiliés de naissance. puis l’on découvre que même notre humiliation ne l’intéresse pas.
on tente alors de leurrer le silence, on laisse tomber le livre de chevet. espoir vain, le petit bruit ne fait que l’effleurer et se perd dans le tourbillon obscur et immobile. alors, on prend son courage, et on ne lutte plus. on se laisse pénétrer, on part avec, nous devenons nous-même ce fantôme tant espéré. vivre à l’orée de la mort et des étoiles est une vibration insupportable pour nos veines fragiles et l’on ne sent dans ses oreilles que son cœur. et quand un coeur se montre à nu, ce n’est sûrement pas pour communiquer mais pour se soumettre…
Formidable d’écrire ainsi ! Des points qui ne veulent pas être suivis de majuscules ! Une lecture plus mouvementée que la nuit autour et qui nous fait sombrer soudainement vers le sommeil tout en échappant le livre ! ❤️
Jadore
Incroyable